Un déjeuner avec Sarkozy qui frise l'incident diplomatique…
Comme je l’avais indiqué dans un de mes précédents billets, avec des collègues députés et sénateurs, de gauche et de droite, nous avons été plusieurs fois reçus à déjeuner par Nicolas Sarkozy à l’Elysée. Le président de la République avait, en effet, jugé utile de recevoir toutes celles et tous ceux qui participent à un groupe de travail mixte Sénat-Assemblée créé à l’automne 2008 pour réfléchir sur la crise financière et proposer des mesures pour tenter d’y faire face.
Bizarrement, alors que ce groupe de travail existe depuis plus de six mois, il a fallu attendre la troisième rencontre avec le président de la République, ce mercredi 15 avril, pour que cela commence à intéresser certains médias. Pour être précis, le journal Le Monde a fait un article dans son édition datée du 15 avril. Est-ce parce que cet article (fort bien rédigé par Claire Guélaud d’ailleurs) annonçait ce déjeuner avec Nicolas Sarkozy ? Toujours est-il que d’autres ont commencé à s’y intéresser.
Libération sort donc un article dans son édition du 16 avril qui rapporte un certain nombre de propos tenus à ce déjeuner par les uns et les autres à commencer par ceux du Président en personne. On se doute d’ailleurs que c’est cela qui intéresse davantage que ce qui a pu être dit par la vingtaine de parlementaires présents. C’est le privilège de la fonction.
Alors que je suis rentré tranquillement dans ma circonscription et que je profite de deux jours de pause dans ma maison d’Orvault (pendant ce qui est censé être une des deux semaines de vacances parlementaires), j’avoue ne pas avoir prêté une grande attention à ce que les médias pouvaient rapporter de ce déjeuner. Comme les précédents, il était intéressant, sans doute plus encore que les précédents, car il avait permis de faire le bilan du sommet du G20 à Londres la semaine dernière. Sur la forme, Sarkozy fait du Sarkozy. Sur le fond, de la régulation financière aux paradis fiscaux, en passant par les questions monétaires ou commerciales, il y a matière à discuter, même si le Président nous laisse peu nous exprimer et a toujours réponse à tout. Des liens entre ces orientations internationales et sa politique nationale, il ne veut point entendre parler…
A ma grande surprise, je reçois en début d’après-midi un appel téléphonique d’un journaliste espagnol d’El Publico. Je ne manque pas d’être surpris tellement il me paraît improbable que mon action de député écologiste français puisse avoir un quelconque intérêt pour le lecteur d’un journal espagnol…
Il me demande de confirmer les propos rapportés dans Libération. Il m’explique que toute la presse espagnole s’en est emparée et qu’il commence à y avoir une polémique sur le fait de savoir si Sarkozy a dit que Zapatero (le premier ministre socialiste d’Espagne) «n’était pas très intelligent». On frise l’incident diplomatique me dit-il, d’autant plus que Sarkozy doit venir en visite d’Etat en Espagne dans quelques jours!
J’ai donc commencé par aller chercher Libération dans ma boîte aux lettres et par relire ce fameux article intitulé «Sarkozy se voit en maître du monde». Honnêtement, il est toujours difficile de dire si tel ou tel mot a été prononcé. C’est pour cela que je me suis abstenu jusqu’à présent de raconter sur mon blog ces déjeuners (la coordinatrice des blogs de Liberation m’a pourtant tanné en ce sens!). Mais après relecture, je peux confirmer que rien de ce qui est dit dans cet article n’est faux.
Le style de Sarkozy est ce qu’il est, et je m’étonne qu’après deux ans de présidence de la République, certains soient encore surpris. Après tout, de la part des Espagnols, c’est plus logique: ils n’ont pas à le subir, matin, midi et soir à la radio, à la télé et dans les journaux…
Mais, il ne doit pas y avoir d’erreur d’interprétation non plus: il était très clair que Nicolas Sarkozy faisait l’éloge de Zapatero, comme de Gordon Brown ou de Felipe Gonzalez, pour s’en prendre ironiquement aux socialistes français sur le mode: «Ah si seulement vous étiez aussi intelligents que les dirigeants de gauche d’Espagne ou de Grande-Bretagne, vous ne seriez pas battus aux élections… et vous arrêteriez de me critiquer, car eux sont d’accord avec moi!»
Bizarrement, ce raisonnement ne semble pas s’appliquer à Barack Obama, président –de gauche– des Etats-Unis, avec lequel il semble avoir un petit problème… d'ego ?
Comment va se dénouer cet emballement médiatico-diplomatique? A suivre…
• François de Rugy •
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